Le marché de l’énergie : une situation complexe pour les consommateurs
L’observatoire de l’Industrie Électrique (O. I.E) vient de publier une note particulièrement intéressante sur la situation complexe du marché de l’énergie. Durant des décennies, le marché de l’électricité s’est limité à un axe simpliste avec d’un côté des producteurs et de l’autre des consommateurs. Le régime de monopole n’a guère favorisé le développement d’un élément du puzzle qui fait aujourd’hui cruellement défaut : la gestion de l’énergie à court, moyen et long terme. La crise financière de 2008 et la montée en puissance sans plus de contrôle de l’énergie renouvelable, le tout sur fond de baisse de la consommation, n’ont fait qu’accélérer l’érosion de la rentabilité des investissements en matière d’énergie.
Une situation de surcapacité née de l’absence d’anticipation
Passer d’un système de monopole de l’énergie à un marché ouvert était censé favoriser la concurrence. C’est du moins ce que prévoyait la politique européenne élaborée dans les années 2000, mais mise en œuvre seulement 10 ans plus tard en subissant les ravages de la crise financière de 2008. Dans un domaine de l’énergie qui demande une extrême précision, cette discordance n’a pas manqué de faire des dégâts. Ceux-ci ont été accentués par les différences d’appréciation de chaque gouvernement des pays membres de la communauté alors que l’unité a toujours été une arme efficace face à une crise.
La ligne politique générale des années 2000 reposant sur une hausse de la consommation, l’énergie renouvelable a attiré de nombreux investisseurs, les énergies fossiles se voyant limités par l’adoption du paquet énergie-climat baptisé 3 fois 20 (-20 % d’émissions de GES, 20 % d’ENR, +20 % d’efficacité énergétique).
Les investisseurs privés appelés à la rescousse pour contribuer au développement des ENR devenues incontournables se sont retrouvés face à une double problématique. La première concerne une baisse de la consommation au lieu de la hausse programmée. La deuxième est l’absence d’une véritable concurrence, EDF et ses filiales restant toujours incontournables. Du fait qu’il était trop tard pour faire marche arrière, les fournisseurs d’énergie se sont lancés dans des investissements plus ou moins contrôlés, la quantité étant censée apporter un minimum de rentabilité.
Faute d’outils européens réellement structurés, le marché de l’électricité s’est retrouvé en surcapacité, les aides de l’État désirant atteindre l’objectif de capacité d’ENR n’ayant rien arrangé.
En parallèle du développement des énergies renouvelables lors de la moitié des années 2000, les installations traditionnelles thermiques ont continué à être développées et renouvelées. Ajoutée à la montée en puissance progressive des ENR et à la baisse de consommation, la surcapacité ne pouvait qu’éroder notablement les marges bénéficiaires des fournisseurs d’énergie.
La sortie de crise économique n’ayant rien changé au paysage du marché de l’énergie avec des prix tirés vers le bas, nombreux sont les entreprises du domaine qui se sont délestées temporairement ou définitivement d’une partie de leurs actifs. Alors que l’objectif fixé au sommet des instances européennes est encore loin d’être atteint, ce désengagement des investisseurs fait peser une sérieuse menace sur l’avenir.
Mutations en ordre dispersé et économies qui se font attendre
Alors que la situation actuelle du marché de l’électricité est pour une bonne partie due à un manque d’unité des décisions européennes, les corrections nécessaires restent de la prérogative de chaque pays membre.
C’est ainsi qu’en Allemagne, les opérateurs historiques sont touchés de plein fouet par une forte baisse de la rentabilité. Certaines installations récentes telles des centrales à gaz sont mises en sommeil.
En Espagne, la nouvelle politique de fixation des prix à destination des clients finaux risque d’aggraver la situation. En Italie et malgré une énergie la plus chère d‘Europe, les actifs ne parviennent pas à couvrir les coûts. Le Royaume-Uni s’étant moins engagé dans les ENR que d’autres pays, il est moins touché par la situation actuelle. Les autorités sont toutefois conscientes du problème à venir et élaborent une réforme en anticipant le renouvellement du parc.
En France et ailleurs, le client final voit d’autant moins les avantages du marché de l’énergie que les collectivités ont investi parfois massivement dans des ENR difficilement rentables. Alors que les prix de gros n’ont jamais été aussi bas, le coût de l’énergie ne suit que trop rarement la même tendance qu’il s’agisse des entreprises ou des particuliers.
Une transition énergétique associée à une visibilité sur le long terme
Quel que soit le domaine, un investisseur a besoin d’un package intégrant entre autres une prévision de rentabilité et une projection sur l’avenir. La mutation imposée ces dernières années a mis en exergue le besoin criant d’une gestion fine et en permanence réactualisée. Cette notion de gestion spécifique a été grandement occultée par le poids des opérateurs historiques fonctionnant sur le modèle unique production-consommation, voire l’inverse. La transition énergétique demande autre chose pour fonctionner de manière efficace, ce dont le marché de l’électricité fait aujourd’hui les frais avec des risques bien réels pour l’avenir.
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